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Les mots de la Grenouille
9 janvier 2012

fEu

Ils lui ont mangé la bouche et tranché la langue.
Ils lui ont enfoncé dans la gorge des mots étrangers et forcé des propos qui n'ont jamais été siens.
Ainsi ils avaient entendu, c'est qu'ainsi elle avait dit, assurément.
Ils ont anéanti sa pensée, ils l'ont réduite au fétu-foetus de paille qu'elle ne savait pas être. Qu'elle savait ne pas être.
Ils ont voulu lui casser les ailes, ils ne les ont pas trouvées. Alors ils lui ont cassé les bras. Ils ne se sont pas dit qu'ils s'étaient trompés, non, ils ont cru qu'elle les recelait ailleurs, sûrs qu'ils étaient qu'elle cachait en son sein de la poudre d'escampette.
Ils l'ont brûlée sur le bûcher de leurs peurs irraisonnées.

Le Grand Inquisiteur s'est avancé. Derrière son rictus satisfait, il sifflait :
"Sorcière, Vipère, j'aurai ta peau, je t'écaillerai les os, et sous tes lambeaux purulents, j'offrirai à la vue de tous ta véritable nature et ses putrifides relans. Tu es monstresse, tu es diablesse, tu es dévoreuse d'âme. Que faudrait-il que je sacrifie pour que tu te repaisses ?"

De sa voix rauque et suffocante, alors que les premières flammes lui recroquevillaient déjà les pieds, elle répondit:
"Ne vois-tu pas que derrière ce voile de fumée, ce n'est pas moi que tu peux voir ? Regarde bien, ce miroir que tu brandis, amer sésame, ne le tiens-tu pas la face du mauvais côté ? Tu me cries sorcière, je t'ai fait peur ? Mais dis-moi, qui est le possédé ? Qui est le possesseur ?"

Puis elle s'éteignit, désolée.



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venir perdre le nord...
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